Sur le plan morphologique, les neurones sont des cellules fortement polarisées. Leurs compartiments dendritique, somatique et axonal contiennent des microdomaines membranaires (épines dendritiques, segments initiaux d’axones, nœuds de Ranvier, zones actives présynaptiques) caractérisés par des accumulations spécifiques de récepteurs et de canaux qui définissent les propriétés d’intégration et le profil de décharge du neurone. Cependant le phénotype électrique d’un neurone est plastique. Sur le plan physiologique, cette plasticité est la base de l’apprentissage et du stockage de la trace mnésique, mais des défauts de fonctionnement conduisent aux maladies neurologiques et neuromusculaires incapacitantes.
Notre projet porte sur le rôle des canaux sodium et calcium voltage-dépendants dans l’acquisition de l’excitabilité électrique et dans la libération de neurotransmetteurs. Nos concepts et nos objectifs concernent les aspects dynamiques. Il s’agit de comprendre comment (i) l’adressage, l’ancrage et la régulation des canaux déterminent la plasticité des réseaux neuronaux ; et comment (ii) des défauts au niveau moléculaire qui perturbent ces processus, conduisent à l’épilepsie, l’ataxie et la myasthénie associées aux canalopathies.
Pour mener à bien notre projet en génomique fonctionnelle nous faisons appel à une gamme importante d’approches methodologiques : interactions protéines/protéines, transfection neuronale et imagerie, analyse en patch clamp de la plasticité sur des tranches de cerveau.
Ces méthodes permettent de poser des questions fondamentales. Quelles sont les motifs moléculaires et les voies de trafic vésiculaire qui ciblent les canaux vers un microdomaine axonal ? Comment les interactions co-ordonnées avec des facteurs régulateurs et des éléments du cytosquelette déterminent-elles l’ancrage et la modulation des canaux à la surface cellulaire ? Quels sont les mécanismes de couplage des canaux calcium à la fusion de vésicules synaptiques aux zones actives ? Est-ce que ces processus contribuent aux modifications durables de l’excitabilité intrinsèque, ce qui constituerait une nouvelle manière, complémentaire à la plasticité synaptique, de stocker des informations.
L’intégration de ces méthodes et concepts pour explorer la physiopathologie requiert la production et l’analyse de modèles cellulaires et animaux de maladies neurologiques. Nos projets concerneront : l’ataxie spinocerebellaire de type 6, une maladie neurodégénerative associée à une expansion polyglutaminique dans le canal Ca v 2.1 ; et une épilepsie myoclonique sévère du nourrisson associée aux mutations dans le canal Na v 1.1. L’analyse morphologique et électrophysiologique des mutants de souris med et med J présentant un défaut d’expression du canal Na v 1.6, pourrait nous renseigner sur la dystrophie scapuloperonéale et des maladies démyélinisantes. Enfin, nous nous appuierons sur notre expertise dans la résonance plasmonique de surface pour développer de nouvelles méthodes de diagnostic des canalopathies auto-immunes et pour identifier des marqueurs neuroendocriniens dans les biopsies tumorales.
En conclusion, l’Unité « Neurobiologie des canaux ioniques » se propose d’intégrer les concepts et les méthodologies de la génomique fonctionelle afin de cartographier et d’explorer le rôle physiologique de domaines protéiques des canaux et ainsi de comprendre comment des mutations et des réponses auto-immunes conduisent aux maladies neurologiques chez l’homme.